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Le musée Van Buuren et un concert au palais
des Beaux-Arts

                                                                                                          Sauvenière,  fin juillet 2002.

 

Deux activités étaient à nouveau prévues en ce mois de juillet.

La première s’est déroulée à Bruxelles la veille de la fête nationale. En première partie, nous avons visité le Musée David et Alice van Buuren. Une petite merveille qui se dissimule dans une rue calme d’Uccle.

Maison privée Art déco, construite en 1924 par le collectionneur et mécène David van Buuren. Elle a conservé intacts son mobilier et ses objets d’art et présente une exceptionnelle collection de tableaux et de sculptures dans des jardins remarquables. 

Né à Gouda, David van Buuren a très jeune l’occasion d’admirer de près les objets d’art que vendait l’un de ses oncles, antiquaire à Amsterdam. Adolescent, il s’intéresse aux arts appliqués alors au centre de recherches de nombreux artistes hollandais. Devenu banquier, il s’installe en Belgique en 1909 et est promu chargé d’un cours de déontologie financière à l’université. Parallèlement, par goût, il devient rapidement collectionneur, puis mécène et il se distingue par l’audace de ses choix. Pour bâtir sa maison, David van Buuren fait appel à deux architectes inconnus à qui il peut imposer ses propres choix. Peintre et dessinateur amateur, il conçoit également certains éléments de la demeure et dicte aux architectes plusieurs de ses idées. C’est le modèle hollandais qui l’inspire. L’intérieur obéit aux principes mis en exergue par l’école d’Amsterdam, celle du Stijl et même celle du Bauhaus. Il est donc conçu dans le même esprit et avec le même soin que l’architecture extérieure et l’on y banni l’utilisation d’objets fabriqués en séries. Pour ce qui est du mobilier, van Buuren et son épouse font appel aux ensembliers décorateurs les plus célèbres : en Belgique, l’ébéniste malinois Wynants est choisi. Ce dernier est chargé de dessiner la salle à manger, tandis que l’agencement du petit salon, du bureau et du cosy corner est confié au studio Dominique à Paris, celui-là même qui signe les intérieurs de couturiers célèbres, de bijoutiers et de collectionneurs. Le décorateur fait usage d’une profusion d’essences exotiques que complètent des vitraux, des étoffes et une splendide collection d’œuvres d’art et d’antiquités. David accorde sa préférence aux artistes des Pays-Bas. L’un de ses tableaux les plus anciens est une version de la Chute d’Icare attribuée à Peter Breughel l’Ancien. Il est accroché dans le salon Art Déco face à un paysage d’ Hercule Seghers. Un tapis résolument moderne est disposé entre les deux œuvres. Il est signé Jaap Gidding, artiste avant-gardiste. Cet artiste remettait régulièrement ses cartons à l’atelier de tapisseries mis sur pied par Elisabeth de Saedeleer, filleule du peintre Van de Woestyne. Celle-ci y réalisait les projets d’artistes tels que Gustave Van de Woestyne, Edgard Tytgat, Frits Van den Berghe ou Sonia Delaunay. Dans l’entrée est suspendu un lustre de Jan Eissenloeffzl, joaillier. Dans la cage d’escalier resplendit la magnifique Table des Enfants de Gustave Van de Woestyne. Ce dernier est un ami de la famille et la maison van Buuren réunit certaines de ses plus belles toiles dont six natures mortes peintes spécialement pour les murs de la salle à manger. D’innombrables tableaux dus à Joos Van Cleve et Adrian Ysenbrandt voisinent avec des statues de Georges Minne, les dessins de Gustave De Smet dont le très beau « Modèle se chauffant », des huiles sur toiles de Rik Wouters. Tous ces noms relèvent de l’école de Lathem Saint Martin. Le musée renferme aussi des antiquités dont une collection de faïences de Delft.

La visite s’achève en se délassant dans le parc qui comporte une roseraie et un jardin pittoresque aménagés par Jules Buyssens. René Pechère quant à lui a réalisé le jardin du cœur et le labyrinthe. Les van Buuren ajoutaient régulièrement à ce petit domaine quelques parcelles de terrain. Après la mort de son mari, Alice van Buuren a poursuivi la voie tracée à eux deux. En 1970, elle met sur pied la fondation dont le musée fait partie.

René Pechère, dont on vient de parler, est un architecte de jardins hors pair. Il a ordonné la géométrie des jardins de l’expo 58, du Mont des Arts et du Berlaymont. Capable de faire pousser des arbres sur 40 centimètres de terre au-dessus d’un parking souterrain, il entre dans l’histoire pour ses prouesses écologiques.

Petit-fils de Paul Héger, le président de l’Université libre de Bruxelles, il était devenu paysagiste malgré lui. Il avait grandi trop vite et son père l’envoya prendre l’air de la campagne chez Buyssens, maître bruxellois de l’architecture de jardins, et il a ensuite fait ses études à l’école d’horticulture de Vilvoorde. En 1935, il dirige l’équipe de jardiniers de l’Exposition universelle de Bruxelles. En 195,8 il fonde le Plan Vert chargé de l’entretien des plantations dans la capitale et dessine le fameux jardin congolais de l’ Expo. Il est allé sept semaines chez les Bantous pour s’apercevoir qu’ils avaient pour seul jardin un espace de terre battue qui les protégeait des serpents. De retour au Heysel, il crée il crée une végétation symbolique ; son jardin congolais explorait l’Afrique à travers un dallage en zigzag inspiré de motifs de vannerie rwandaise et des triangles plantés dans les angles rappelaient les velours du Kasaï. C’est lui qui restaure les jardins de Beloeil et de Seneffe. Sa bibliothèque comportait plus de 2000 ouvrages sur l’art des jardins. Parmi les pièces rares de sa collection, un recueil du XVIème siècle qui l’inspira dans le croquis du Jardin des Quatre Saisons de l’Expo 58 dédié à Vivaldi. Dans son esprit, les jardins traduisaient les conceptions philosophiques des sociétés qui les ordonnent. Au Musée van Buuren, son labyrinthe de 1300 ifs taillés en 1968 témoigne encore de sa conviction profonde dans la force de l’addition des bonnes volontés pour faire triompher la subtilité des idées.

Certaines personnes ont trouvé ce petit musée ravissant, d’autres étaient plus réservées. Il est vrai que ce genre d’intérieur n’est pas courant et que dans la vie courante, ce genre d’intérieur ne se voit pas tous les jours. Autre petit bémol, l’une des deux guides n’était paraît-il pas exceptionnelle, cela contribue aussi à l’idée générale que les visiteurs retirent d’une visite.

Les jardins par contre, visités sous un merveilleux soleil, sont appréciés par tout le monde. Le labyrinthe qui a une signification très symbolique paraît-il, mériterait d’être parcouru très lentement afin d’en saisir le sens.

 Notre après-midi s’est poursuivie par un repas pris au Sablon et ensuite, nous sommes allés au Palais des Beaux-arts afin d’y écouter un superbe concert donné par des lauréats du Concours Reine Elisabeth.

Ce concours a pour but premier d’aider les jeunes musiciens à l’aube d’une carrière parmi les plus difficiles. Ils sont soumis à une préparation extrêmement rude afin de leur permettre de se mesurer valablement aux plus brillants éléments de leur génération. Les deux personnalités qui ont été à la base du concours sont d’une part la reine Elisabeth et d’autre part Eugène Isaye. Le projet qu’il présente à la reine en 1924 est de mettre sur pied un concours de haut niveau : des jeunes virtuoses de toutes origines y seraient jugés par leurs pairs pour leur talent. Il faudra attendre 1937 pour assister au premier concours qui s’appelle à  cette époque le Concours International Eugène Ysaye.

Des préliminaires à la présentation finale, les épreuves durent 1 mois. Dès le moment où ils sont inscrits, les candidats s’engagent à respecter le règlement à la lettre. Ils travaillent les morceaux de leur programme : les chanteurs une trentaine de mélodies, lieder, airs d’oratorio ou d’opéra. Les pianistes une quinzaine d’œuvres allant de l’étude au concerto en passant par les préludes et fugues de Bach et les sonates de Beethoven ; les violonistes, une douzaine d’oeuvres, les favoris étant les caprices de Paganini, des sonates pour violon seul, des mouvements de concerto, etc. Il y a une épreuve préliminaire éliminatoire. Le nombre de participants n’étant pas limité, chaque candidat dispose d’une dizaine de minutes pour convaincre le jury de ses aptitudes. L’ouverture officielle de la session a lieu le jour du tirage au sort qui déterminera l’ordre de passage pour toute la durée de l’épreuve. Viennent ensuite les demi-finales où il ne reste déjà plus que 24 candidats. Le jury s’assure qu’ils sont des musiciens complets, capables de restituer la musique de jadis et la musique vivante avec le respect dû aux compositeurs avec la musicalité et l’expressivité voulues. Les candidats doivent présenter un véritable récital illustrant toutes les facettes de leur talent. Violonistes et pianistes ont deux imposés qui leurs sont communiqués dès l’acceptation de leur dossier. Vient ensuite l’épreuve finale au cours de laquelle une présence royale ou princière est quasi quotidienne. Pour leur dernière prestation violonistes et pianistes doivent interpréter le concerto imposé, une sonate choisie par eux dans une liste établie et un concerto de leur choix. Et le dernier soir, c’est le cérémonial de la proclamation des résultats, tout cela largement retransmis par différentes radios et chaînes télévisées.

Le concours terminé, lauréats et finalistes ont encore des engagements. Une carrière internationale s’ouvre en général aux candidats.

Au cours du concert de ce soir nous avons eu l’occasion d’écouter :

Akkiko SUWANAI2ème lauréate violon en 1989, a interprété du Beethoven.

Abdel-Rahman EL BACHA, 1er lauréat 1978, au piano interpréta des œuvres de Chopin,

Stephen SAKLSTERS  Baryton, 1er lauréat chant en 1996, et Olga PASICHNYK, soprano colorature 3ème lauréate chant 2000, ont interprété des morceaux de Rigoletto de Verdi.

Si quelques personnes avaient été déçues par la visite du musée van Buuren, l’audition du concert, présenté dans la salle Leboeuf du Palais des Beaux-Arts, a ravi tout le monde. Nous avons passé là des moments inoubliables.