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Turnhout et la Campine

 

Sauvenière, fin juin 2003,

Bonjour à tous et à toutes,

Notre excursion de juin s’est déroulée en Campine. Plus exactement, la ville de Turnhout nous attendait ce mois-ci.

Capitale de la carte à jouer, Turnhout est la plus septentrionale de nos cités, nichée tout au nord de la province d’Anvers. Turnhout vit le jour autour du château des ducs de Brabant au centre de la ville actuelle. Le château date du XIIème siècle mais fut remanié à plusieurs reprises, notamment quand il servit de résidence à la gouvernante des Pays-Bas, Marie de Hongrie, la sœur de Charles-Quint. Au début du XIXème siècle, Turnhout était une petite ville textile : de nombreux hommes travaillaient dans des entreprises produisant du coutil et les femmes pratiquaient l’art de la dentelle aux fuseaux. Après 1830 à l’initiative de P.J. Brepols, la ville se lança dans l’industrie du papier. Les entreprises locales se mirent à produire des imprimés en tous genres, du papier coloré et marbré, puis des cartes à jouer et des livres. La maison d’édition Brepols, installée à Turnhout, porte encore le nom de son fondateur. L’entreprise Carta Mundi est l’un des principaux producteurs de cartes à jouer au monde.

Dans beaucoup de villes et de villages campinois, l’on trouve un monument à la mémoire des victimes de la Guerre des Paysans néerlandais (Boerenkrijg). A la fin du XVIIIème siècle, le régime français institua la conscription. Cette mesure provoqua les protestations de la jeune population paysanne. Tout comme au Pays de Waes et dans le Petit Brabant, des troubles éclatèrent partout en Campine et les opposants se regroupèrent en octobre 1798 pour lutter contre la petite armée républicaine. Mais les paysans, mal armés et non entraînés durent baisser pavillon. Le 8 décembre leur armée de 3000 hommes fut battue à Hasselt.

Les abbayes sont légion dans la Campine anversoise : Westmalle, le prieuré de Corsendonck, les abbayes norbertines de Tongerlo et Postel, soit 4 grandes abbayes dont 3 sont encore occupées par des moines. Ces abbayes sont admirablement situées au milieu de la nature et dans des sites naturels d’une grande quiétude. Chaque abbaye produit au moins une bière ou un fromage à son nom.

De nos jours, Turnhout est une jeune société qui vit et travaille. A côté d’un grand service public et une forte présence graphique se sont ajoutées des fabriques d’alimentation, métallurgie légère, transport de marchandises international, une usine d’ampoules électriques, etc…Turnhout est également un centre culturel et pédagogique pour la région. Environ 50 installations éducatives accueillent quotidiennement plus de 16.000 enfants... De nombreux visiteurs et étudiants effectuent des travaux de recherche dans la riche bibliothèque scientifique et aux archives.

Au cours de cette journée nous avons visité :

Le musée de la carte à jouer

Aménagé dans une ancienne fabrique de cartes, il contient une exceptionnelle collection de cartes à jouer venant de tous les coins du monde. C’est une balade dans l’histoire expliquant la production de la carte à jouer. Les guides nous ont expliqué l’évolution de la carte à jouer au cours des siècles.

D’abord réalisées à l’aide de tampons de bois et pressées sur papier, elles étaient bien sûr à cette époque assez grossières au point de vue des représentations.Elles ont ensuite été confectionnées sur des imprimantes, munies de presse et de feutre. L’étape suivante a été la lithographie : les motifs étaient d’abord gravés sur des pierres spécifiques venant d’Allemagne et ensuite reproduites. La pierre était couchée dans un chariot spécial. Elle était d’abord humidifiée et ensuite encrée. L’ouvrier couchait ensuite une feuille de papier sur la pierre, plus un tissu de protection. Une plaque est ensuite abaissée et en appuyant sur une pédale, un va et vient actionne le rouleau de l’avant vers l’arrière. Les papiers imprimés devaient ensuite être suspendus pour séchage. Ne me demandez pas trop d’explications : j’ai de la documentation rédigée uniquement en néerlandais, et en plus je n’ai pas l’esprit pratique. J’ai vu et tenté de comprendre, mais de là a tout relater, il y a une fameuse marge ! Il y a également eu la période de la fabrication à la vapeur. Une machine de cette capacité pesait 40 tonnes, c’est vous dire la place qu’elle occupait dans l’usine. Comme ces entreprises exportaient dans le monde entier, c’est à la demande du client qu’ils réalisaient des jeux de cartes différents, tant en sujets représentés qu’en format. Témoins ces jeux de cartes chinois où les cartes ont à peine la taille d’un grand domino. Une nouvelle collection de machines à vapeur y est installée, dont une impressionnante par sa taille. Mise au rebus, elle a été entièrement restaurée par deux passionnés qui ont donné 10.000 heures de leurs loisirs pour la remettre en état. Une démonstration de son fonctionnement est d’ailleurs faite en bout de visite.

A l’heure actuelle la firme Carta Mundi, leader dans la fabrication de la carte à jouer est capable de fabriquer 600.000 jeux de cartes journellement. Imaginez l’évolution depuis le XVIIème siècle. Cet intéressant  musée vient de rouvrir ses portes après plus de deux ans de réaménagement.

Le Béguinage

L’âge du Béguinage de Turnhout n’est pas connu avec précision. Aux archives du Béguinage repose cependant un parchemin daté de 1372 émanant de Marie de Brabant et octroyant la franchise d’impôts. D’anciennes lettres ont été perdues dans un incendie, mais les archives de la ville possèdent toujours une charte où il est fait allusion au Béguinage en l’an 1365.

Cette charte permet d’affirmer que le Béguinage de Turnhout existe depuis plus de 637 ans, probablement depuis plus longtemps encore. En 1400 déjà, un hôpital fut aménagé dans l’enceinte du Béguinage où des soins étaient dispensés aux béguines malades et âgées. Le 12 juillet 1562, un incendie détruisit une grande partie du béguinage. La reconstruction fut entamée assez tôt, mais en raison du nombre croissant de béguines l’extension des bâtisses dut être envisagée. En 1665, la construction d’une nouvelle église fut entreprise. D’après d’anciens plans, l’on montre que vers 1673 le béguinage possédait deux églises. Une grande partie des habitations actuelles datent de cette époque. La Révolution française n’a pas épargné le lieu. L’église devint le « Temple de la Loi ». Les béguines se sont opposées avec la dernière énergie à la disparition de leur enclos et il a été déclaré patrimoine national. La lente disparition de la vie conventuelle s’est manifestée suffisamment à Turnhout pour que des personnes aient la présence d’esprit de sauver  les principaux objets et meubles de valeur pour en faire un musée. Actuellement, le Béguinage est occupé par des dames ou des demoiselles âgées et des prêtres à la retraite, ce qui leur permet de terminer leurs jours dans le calme et la paix.

Le Béguinage de Turnhout est la plus ancienne institution religieuse de la ville. Il est le berceau de l’enseignement dans la région et aujourd’hui, il y a toujours une vie culturelle. Depuis 1967, les « Amis du Béguinage » organisent à chaque arrière-re-saison un cycle de cours d’orgues sur l’orgue baroque qui date de 1668.

Signalons encore que ce béguinage prend place parmi les 13 béguinages qui ont été inscrits par l’Unesco sur la liste du patrimoine historique culturel.

Ce musée évoque simplement la vie quotidienne des sœurs. Si l’on n’y trouve pas trace de pauvreté, l’on y voit par contre des chasubles, de l’orfèvrerie, des tableaux d’une grande qualité artistique.

L’après-midi, une promenade, en car, dans les environs de la ville nous a fait découvrir quelques communes avoisinantes. Et notamment, Merxplas, dont l’on entend souvent parler, mais qui détient un record : celui des institutions pénitentiaires.

Tant pour les grands délinquants que pour les jeunes, ce dernier étant un centre ouvert. Ils peuvent, suivant certaines conditions bien sûr, suivre des cours, se rendre au travail etc…Nous avons également longé un cimetière attenant à un centre. Certains détenus, personne n'en demandant la dépouille ou totalement sans famille, sont enterrés là. Une simple croix, en béton, la même pour tous, indique le lieu de leur repos.

Nous sommes encore passés à Hoogstraten, langue de territoire belge enfoncée dans les Pays-Bas,  qui se revendique d’avoir une église haute de 102 m couverte d’un clocher à bulbe. L’intérieur est un véritable musée in situ. Au milieu du chœur, nous aurions pu observer, car ils sont pour le moment recouverts pour travaux, le tombeau d’Antoine de Lalaing et d’Isabelle de Culembourg, beaux gisants d’albâtre sur un sarcophage de marbre noir, attribué Jean Mone. Les dossiers et accoudoirs des stalles sculptées entre 1552 et 1558 ont un caractère gothique remarquable. Les fenêtres sont garnies de vitraux du premier tiers du XVIème siècle dont  les cartons sont signés Bernard van Orley.

Nous avons également fait une incursion à Baarle-Hertog (Bar-le-Duc), qui est la plus insolite des loufoqueries belges. Au XIIème siècle, la terre de Baarle fut partagée entre le Brabant et la seigneurie de Bréda, l’enclave suivit le sort du duché brabançon jusqu’à son intégration dans la Belgique. Depuis 1830 jusqu’à l’automne de 1995, ces multiples enclaves belges en territoire hollandais ont nourri quelques générations de diplomates et géomètres. Mais de nos jours, la frontière est définitivement fixée. Plus sérieusement, Baar, une place forte de la contrebande avant les traités européens, est aujourd’hui un semis de maisons dont la seule particularité est de porter un petit drapeau à l’entrée. En effet selon que la porte est en Belgique ou aux Pays-Bas, la maison et ses habitants dépendent de l’un ou l’autre Etat, solution plus pratique que de changer de nationalité en passant de la cuisine à la chambre à coucher !  Encore une journée intéressante à ajouter à notre actif, et, ce qui ne gâte rien, elle s’est déroulée par beau temps.

A bientôt pour de nouvelles découvertes partagées,