dernière mise à jour 2/05/17

 
2017
 

 

Les moments forts de la bonneterie en Hainaut et le « Concours Amaryllis » à Beloeil

 

Gembloux, le 25 avril 2017

 

Bonjour à toutes et tous,

 

L’excursion du 20 avril 2017 était essentiellement dédiée au « Concours amaryllis » qui se tenait à ce moment au château de Beloeil. Mais au matin, nous avons fait un petit crochet par Quevaucamps pour visiter le « Musée de la Bonneterie et du Négoce de la Toile ». Par cette belle journée printanière, je ne pouvais rêver mieux pour inaugurer le nouveau car de Thierry par Copin’Age que de le remplir jusqu’au dernier siège (un couple avait même fait le déplacement en voiture privée) : au total, nous étions 52 pour cette première excursion de l’année.

Après le trajet sans entrave, nous avons fait une petite halte à Aubechies, un des plus beaux villages de Wallonie établi dans un cadre champêtre du parc des Plaines de l’Escaut et représentatif de l’architecture hennuyère. C’est le domaine de la tuile et de la brique rouge, avec de temps en temps un beau pignon de moellons de grès. Nous nous sommes directement dirigés vers la « Taverne Saint-Géry » où nous avons été chaleureusement accueillis
par Sophie et Christophe pour prendre un café/thé avec un croissant. Leur taverne est située dans une ancienne ferme typique offrant un cadre pittoresque et chargé d’histoire seigneuriale et abbatiale. C’était parfait pour commencer la journée et cela nous a déjà permis de passer quelques instants de dépaysement …

Ensuite, nous avons pris la direction de Quevaucamps, aussi appelé la « Cité des Bonnetiers » ; ses habitants sont les « Poipoines » (je n’ai pas trouvé d’explication à ce sujet). Ce fut d’abord un village d’extraction de la pierre et à l’extinction de cette activité, vers le milieu du XIXe siècle, l’activité bonnetière a pris le relais. On a compté au milieu du XXe siècle jusqu’à 150 bonneteries qui ont procuré de l’emploi à quelque 1.500 personnes. Désormais il n’y a plus que l’une ou l’autre activité bonnetière en train de tricoter la fin de cette belle histoire que deux guides nous ont retracée au « Musée de la Bonneterie et du Négoce de la Toile ». Ce petit musée ouvrit ses portes en 1988 dans l’ancienne gare construite en 1896 en même temps que la voie ferrée Quevaucamps-Blaton dont la mise en service allait sortir la bonneterie locale de sa condition artisanale.

A Quevaucamps comme ailleurs, la bonneterie fut d’abord grande productrice de bas. Une vérité à laquelle le terme « balotil », forgé sur la contraction de « bas » et outil », rend parfaitement compte : le mot désignait ces artisans qui tricotaient des lainages à domicile sur des métiers mis au point en Angleterre au début du XVIIIe siècle. Mais à Quevaucamps, l’histoire de la bonneterie précéda celle des « balotils » et même l’édit par lequel Marie-Thérèse d’Autriche octroya au village une fabrique de bas dès 1757. C’est sans doute leur corporation qui aura le plus durablement marqué le folklore local, avec celle des colporteurs – les « campènaires » – qui s’en allaient par les chemins, le sac à l’épaule, vendre les bas tricotés jusqu’au pays de Liège (ils étaient plus de 130 à Quevaucamps vers la moitié du XIXe siècle). Dans la région de Beloeil, les ultimes vestiges de ce négoce ambulant ne disparaîtront qu’après 1970 avec l’avènement de la vente par correspondance.

Les « balotils », eux, ont fait les frais de la Révolution industrielle qui donna naissance à la bonneterie moderne avec l’apparition de métiers toujours plus élaborés nécessitant une main-d’œuvre sans cesse plus qualifiée. C’est la raison pour laquelle la Province du Hainaut créa en 1913 l’Ecole de Bonneterie de Quevaucamps qui a survécu jusqu’au début des années ’90. L’industrie bonnetière de Quevaucamps, en grande partie orientée vers la production de sous-vêtements, se releva des deux conflits mondiaux mais pas de la mondialisation des échanges : entre 1953 et 1973, l’emploi a chuté pratiquement de 60 % dans le secteur.

La concurrence des pays à bas salaires, mais aussi la structure familiale des bonnetiers ont empêché ceux-ci de s’ouvrir vers les marchés extérieurs, de moderniser l’outil de production et d’investir dans la recherche et le développement. Cantonnés au seul marché intérieur progressivement grugé par la concurrence étrangère, les bonnetiers de Quevaucamps ont dû tour à tour rendre leur tablier. Aujourd’hui, seul le Musée de la Bonneterie et du Négoce de la Toile continue à jardiner pieusement le souvenir de cette tranche glorieuse de l’histoire de la région.

 

En raison de vos nombreuses questions, les guides ont dû accélérer quelque peu la visite en fin de parcours, car il était temps de nous rendre au Château de Beloeil pour le dîner. Ensuite, nous avions rendez-vous avec le printemps au château même. Pour sa 29ième édition, la demeure des Princes de Ligne était envahie par des milliers d’amaryllis, à quoi se rattache un important concours de décoration florale. Les participants à ce concours avaient à leur disposition plus de 6.000 fleurs et le cadre enchanteur du château pour défier leur créativité et leur imagination. Chaque année, les prix sont décernés par un prestigieux jury lors de l’inauguration de l’événement et, cette fois encore, l’Institut Technique de Gembloux a été récompensé

 

D’un port altier, l’amaryllis permet des constructions florales impressionnantes et s’adapte à des structures classiques et contemporaines. Formée de six pétales, chaque fleur, d’une apparente fragilité, flatte et séduit le regard. Dans un bouquet, l’amaryllis domine par la douceur et le galbe de ses pétales. Elle conquiert les cœurs par l’abondance de ses couleurs et la générosité de ses formes. Si chaque fleur est unique, chaque sculpture florale devient au Château de Beloeil une œuvre d’art. Du grand escalier aux appartements du feld-maréchal, du salon des Ambassadeurs à la chambre d’Epinoy, mille couleurs et mille parfums nous ont véritablement étourdis.

 

Le Château de Beloeil est l’un des plus beaux châteaux de Belgique et on le surnomme parfois le « Petit Versailles belge ». Il a été construit au XIVe siècle et, depuis le XVe siècle, son histoire est étroitement liée à celle de la famille de Ligne qui l’occupe toujours aujourd’hui. Il avait résisté à bien de secousses dont la Révolution française, mais le 14 décembre 1900 il fut ravagé par un incendie pour être très rapidement reconstruit (entre 1901 et 1906) selon les plans d’origine. Le plus formidable est que son contenu put être sauvé des flammes ; c’était le jour du marché et toute la population a accouru pour aider le personnel à évacuer ce qui pouvait l’être. C’est ainsi que la précieuse bibliothèque et ses 20.000 livres furent sauvés par les femmes qui les emportèrent dans leurs longues jupes !

 

Nous avons commencé notre visite par le vestibule et le grand escalier d’honneur joliment fleuri pour l’occasion. D’emblée, nous avons été impressionnés par la qualité et l’importance de la décoration : le château est entièrement meublé. A l’étage, les chambres, toutes richement meublées mais aussi fleuries, nous ont rappelé par leur nom – la chambre d’Amblise, la chambre d’Epinoy … – les titres nobiliaires de la famille de Ligne. La pièce la plus surprenante était l’appartement du Feld-Maréchal Charles-Joseph dont la couleur rose a pris largement possession, car c’était sa couleur préférée qui le mettait apparemment de bonne humeur ! En redescendant du premier étage, nous sommes entrés dans la bibliothèque : ici, 20.000 volumes forment de somptueux alignements de reliures originales, serrés dans des boiseries anciennes. Impressionnant !

 

Au rez-de-chaussée aussi, les pièces évoquent des noms qui rappellent leurs fonctions d’origine : la salle des Maréchaux, la salle des Ambassadeurs … Et si la salle à manger n’a pas hérité d’une appellation glorieuse, elle peut malgré tout accueillir une quarantaine de convives autour de sa longue table en acajou, convives qui dînent face à l’enlèvement d’Hélène de Troie reproduite sur une immense tapisserie des Gobelins …

En conclusion, nous avons tous été frappés par le contraste profond entre l’éphémère des fleurs et le cadre historique du château. Ce fut un spectacle étonnant, digne des plus beaux contes de fées !

 

Pour terminer, nous avons pris place dans le petit train touristique pour une visite du jardin de Beloeil avec ses 25 hectares d’harmonie végétale. S’étendant autour d’une immense pièce d’eau, ce havre de paix a conservé toute sa noblesse tranquille. Jusqu’à ce jour, ces jardins sont restés des impassibles témoins des siècles qui avancent. Et s’ils pouvaient raconter les petites histoires de la grande Histoire …

Après avoir pris un café ou une petite chope et un morceau de tarte, nous avons repris la route vers Gembloux.

En vous souhaitant bonne lecture et à bientôt, je vous adresse toutes mes amitiés