"Mozart, un voyage au coeur de l'homme"
par Mr Onkelinx, Professeur au Conservatoire de Liège
Gembloux, le 26 décembre 2017
Bonjour à toutes et
tous,
C’est devant une
salle comble (nous étions 125 !) que notre invité, Monsieur Jean-Marc Onkelinx, musicologue et chargé
de cours au Conservatoire royal de Liège, nous a véritablement emportés le jeudi 21 décembre dernier pendant une
heure et demie, avec une passion et une compétence sans pareilles, dans l’univers
de la vie et de l’œuvre musicale de Mozart. Sa conférence était intitulée
« W.A. Mozart, voyage au cœur de
l’Homme ». Par une écoute active et à travers un parcours captivant,
il a pris comme base le Requiem pour
aboutir à la pleine lumière. Ci-après quelques passages clés qui ont marqué la
vie et la création de W.A. Mozart.
D’emblée, Monsieur
Onkelinx met en avant que Mozart était avant tout un « Homme » et
qu’on lui attribue régulièrement une panoplie de faits et de légendes qui sont
parfois bien éloignés de la réalité historique. Tout le long de son exposé, il
nous a fait découvrir ce personnage à travers la profondeur de sa musique.
Wolfgang Amadeus Mozart est né le 27 janvier 1756 à Salzbourg de parents qui ont eu sept enfants, mais
dont deux seulement survécurent : une fille, Marianne – on l’appelait
familièrement Nannerl – et un garçon, Wolfgang Gottlieb. On transforma plus
tard ce prénom de Gottlieb en son équivalent latinisé Amadeus ; dans la
maison, tout le monde avait donné au bébé ce charmant diminutif de
Wolferl. Ce petit garçon était un joyeux luron, gourmand et farceur, mais
régulièrement la musique prenait possession de lui. Son père, Léopold Mozart,
lui-même musicien de la Cour au service du prince-archevêque, s’est chargé de
son éducation musicale. L’influence du milieu musical de Salzbourg ainsi que
l’exemple et l’enseignement de son père ont agi clairement sur Wolfgang à cette
première période de sa vie. Il a aussi appris beaucoup, tout seul, en assistant
notamment aux leçons de Nannerl qui était également extrêmement douée. Il a
déjà révélé des dons prodigieux pour la musique dès l’âge de trois ans :
il avait une oreille et une mémoire prodigieuses. Il savait déchiffrer une
partition et jouer en mesure avant même de savoir lire, écrire ou compter. À
l’âge de six ans, il composait déjà ses premières œuvres. Il se rendait
régulièrement à Vienne et écrivait, à douze ans, ses premiers opéras.
Accompagné de son
père et parfois d’autres membres de sa famille, Wolfgang a néanmoins passé une
grande partie de son enfance sur les routes, parcourant notamment les capitales
et grandes villes de l’Europe occidentale. Tous ces voyages avaient une grande
valeur éducative. Grâce à eux, Wolfgang a été exposé à un large éventail
d’idées, de coutumes et de modes de vie. Il a vu des pièces de théâtre et lu
des journaux dans plusieurs langues, appris les méthodes de composition des
musiciens de différents pays et acquis une vaste connaissance du monde. Sous
l’effet d’un « enfant prodige », ces voyages lui ont procuré
également une certaine renommée et une aisance financière à la famille.
L’Italie l’a particulièrement marqué : il y étudia l’opéra et, grâce à son
travail sur les harmonies vocales et sa maîtrise de la polyphonie, il donnera plus
tard ses lettres de noblesse à ce genre de musique.
De retour à
Salzbourg, il a obtenu très jeune le titre de maître de concert. Sous les
ordres des princes-archevêques, il a composé des œuvres sacrées, un rôle qui le
priva néanmoins de ses libertés créatrices. Il a cherché alors un autre lieu de
vie. Après une grave déception amoureuse avec Aloysia Weber à Mannheim, il retourna
à Paris. Mais l’arrogance des aristocrates, le décès de sa mère et de sérieux
problèmes financiers l’ont poussé à revenir en 1779 à Salzbourg où il récupéra le
poste de maître de concert. C’est alors, à l’âge de 23 ans, lors d’un moment de
profond désarroi et sur une commande de l’archevêque, qu’il a écrit la Messe du Couronnement. Cependant,
certains extraits musicaux font plutôt penser à une symphonie et on y perçoit aussi
l’hommage à sa mère.
Au faîte de sa
maturité musicale, W.A. Mozart a su inventer un style particulier et exploiter
de nouveaux moyens musicaux. Le succès d’Idoménée en 1781 lui assura les faveurs de la cour salzbourgeoise jusqu’à ce que les différends
répétés avec l’archevêque l’incitèrent à partir à Vienne. C’est à cette époque
que l’empereur d’Autriche, Joseph II, lui passa commande d’un nouveau Singspiel. Mozart, s’inspirant des
turqueries alors en vogue, composa L’Enlèvement
au Sérail en 1782. Cette même année, il épousa finalement Constance Weber,
la sœur d’Aloysia. Ensuite, en collaboration avec le grand librettiste Lorenzo da
Ponte, il put donner la pleine mesure de son talent avec des opéras comme Les Noces de Figaro (1786), Don Giovanni (1787) – on y ressent
l’influence du décès de son père – et Cosi
fan tutte (1790), plaçant l’amour au cœur de ses œuvres. C’est également à
Vienne qu’il a fait connaissance du compositeur Joseph Haydn avec qui il
entretiendra une correspondance et une amitié d’admiration réciproque tout le
long de sa vie.
Un autre fait
important est que, déjà en 1767, Mozart a eu les premiers contacts avec la franc-maçonnerie et,
en décembre 1784, il s’est fait initier dans la loge de la Bienfaisance. Quand
il a composé la Flûte Enchantée en
1791, il fréquentait ce milieu depuis plusieurs années et il y a trouvé une
source d’inspiration. Le célèbre opéra est d’ailleurs appelé « opéra
maçonnique ».
Enfin, en écoutant un extrait du Messie,
on perçoit clairement une influence musicologique ou thématique directe de Haendel
sur certaines œuvres de Mozart et, en particulier, son Requiem. En réalité, parler du « Requiem de Mozart » n’est pas tout à fait exact. À sa mort,
seulement deux parties étaient presque achevées : l’Introït et le Kyrie. Le reste
est demeuré à l’état d’ébauche, avec uniquement les voix et quelques
indications. Le fameux Lacrimosa, qui
suscite tant d’admiration, est en réalité extrêmement lacunaire et s’interrompt
au bout de huit mesures seulement. Le spectaculaire est ailleurs : le
chœur a le devant de la scène et laisse éclater sa puissance. Dans le Dies Irae, moment du Jugement dernier,
une formidable tempête survient : les terribles appels du chœur expriment
tantôt la colère divine qui s’abat sur les hommes, tantôt des tentatives
d’adoucir cette colère, tantôt des cris de terreur … Tout tremble d’angoisse,
de fièvre et d’impatience. L’ultime composition de Mozart touche au
sublime !
À la fin de sa vie, il a cherché à se réconcilier avec lui-même et à
être en paix avec le monde. Malade et criblé de dettes, Wolfgang Amadeus Mozart
meurt à Vienne le 5 décembre 1791 à l’âge de seulement 35 ans et 10 mois, sans
avoir pu achever son Requiem qui sera
terminé à la demande de son épouse Constance par un de ses élèves, Franz Xavier
Süssmayer.
Pour conclure, on peut dire que, dans ses opéras, Mozart a su créer de
vrais personnages humains et fragiles. Pour la première fois dans l’histoire de
l’opéra, ce sont également des œuvres engagées. Entre force et tendresse, entre
gaieté et tragédie, le langage de Mozart reste universel. Et notre orateur,
Monsieur Jean-Marc Onkelinx, nous a réellement fait voyager au cœur de l’Homme …
La conférence s’est terminée sous les applaudissements spontanés et
enthousiastes de la salle. Ensuite, nous avons clôturé
cette dernière activité de 2017 avec le goûter de Noël. Une fois de plus, que
dire de la splendeur de ces tables ! Un tout grand merci à Francine ainsi
qu’à toutes celles et tous ceux qui ont contribué à la réussite de cet
après-midi festif.
Je vous souhaite une très heureuse année 2018 et vous fixe déjà rendez-vous
au mois de janvier prochain. Amitiés,